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vendredi 16 novembre 2018

L'automne de l'angoisse (1/2)





C'est peu dire que je viens de vivre un mois difficile. 

Alors que j'étais en pleine déprime post-voyage raté, combinée à une actualité méga anxiogène et à une confrontation avec ma terreur phobie sévère des souris, je me suis pour la troisième fois cette année retrouvée au chômage technique. Et contrairement aux deux fois précédentes, aucun boulot n'a miraculeusement atterri dans ma boîte mail au bout d'une semaine à peine. Les jours passaient, et tous les messages que j'envoyais me revenaient avec plus ou moins la même réponse: "Désolé(e), mais nous avons déjà du mal à satisfaire les demandes de nos collaborateurs réguliers". Pourquoi? En gros, parce que les traducteurs littéraires sont de plus en plus nombreux alors que les maisons d'édition favorisent de plus en plus la création française en raison d'un coût moindre - et que par ailleurs, comme nos charges ne cessent d'augmenter, chacun de nous a besoin de bosser de plus en plus pour maintenir son niveau de vie.

Ca faisait déjà quelques années que je sentais tourner le vent et que je me disais qu'à défaut d'une reconversion complète, je ferais bien au moins de développer une activité complémentaire. Je n'ai jamais concrétisé pour deux raisons. D'abord, toutes les pistes que j'envisageais - faire du coaching en organisation personnelle ou en pleine conscience, me mettre intensément au yoga et suivre la formation de prof - butaient sur le même obstacle: en cas de réussite, je devrais côtoyer et échanger avec des gens tous les jours. Ce qui me donnait juste envie d'aller m'allonger dans un coin et de me laisser mourir. J'adore transmettre ce que je sais, mais de loin. De très loin. Ensuite, même si je voyais mes collègues touchés par des périodes de chômage technique, j'avais la chance d'être épargnée à titre personnel. Non que je sois meilleure qu'eux, mais je bossais essentiellement sur des séries longues ou des auteurs qui se vendaient bien et avaient une production régulière; du coup, mon planning se remplissait plus ou moins tout seul. 

Et puis la conjoncture a fini par me rattraper comme les autres alors que je ne m'étais préparé aucune porte de sortie. J'avais juste mis un peu d'argent de côté, de quoi tenir 4 ou 5 mois en faisant très attention. Sauf que 4 ou 5 mois, ce n'est pas suffisant du tout pour développer une activité rentable à partir de rien. Donc, j'ai balisé sévère. Même en sachant que ma mère m'aiderait si je le lui demandais, et qu'au pire, je pouvais toujours casser mon assurance-vie pour récupérer l'argent versé dessus, voire revendre mon appartement afin d'"acheter" le temps nécessaire à une formation. Je n'étais pas réellement en danger de me retrouver SDF, mais je sentais les fondations de ma vie d'adulte s'écrouler sous mes pieds. Parce que trois des choses qui me définissent le plus fondamentalement, c'est 1/ je fais un métier que j'adore, dans des conditions idéales pour une sauvage comme moi 2/ je suis autonome et depuis 25 ans, je n'ai jamais eu à dépendre de personne, ni parents ni conjoint 3/ j'ai les moyens de m'offrir les choses que j'aime le plus dans la vie: des bouquins et des voyages. J'avais eu une chance incroyable jusque là, mais apparemment, la roue était en train de tourner.

La photo vient d'ici. Le pin's "Anxious AF" est disponible actuellement dans la boutique Rose à Bruxelles. 

5 commentaires:

  1. Bonsoir,
    Je lis ce blog depuis (seulement ?) un an. Et cette découverte est à l'origine de mon grand changement de vie / coup de pied au derrière. Tout ça pour un avis sur un blouson en cuir ^^.
    Donc déjà : merci ! Parce que même si tu (est-ce que je peux dire tu ?) dis souvent que ce blog ne sert à rien et bien moi il m'a grandement aidée. Et faite rire. Je me reconnais dans certains traits, j'aime pas les gens, et inquiétudes, je me suis reproduite et je flippe pour la planète que je vais laisser à ma fille.
    As-tu déjà songé à la rédaction web ? De toute évidence tu aimes écrire et est douée pour ça.
    C'est ce à quoi je suis venue après avoir constaté que mon niveau d'anglais était excellent pour la lecture mais minable pour la traduction. Les formations ne coûtent pas les yeux de la tête et on garde le bonus essentiel : ne pas côtoyer de gens au quotidien !
    Bonne soirée,
    Cloé

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  2. J'espère que ça s'arrangera pour toi... Si tu dois en arriver là, peut-être qu'au lieu de vendre ton appartement, tu pourrais le louer ?

    Sinon, nous sommes visiblement nombreuses (nombreux ?) à apprécier tes récits de voyage et tes tests de restos. Une piste à creuser peut-être, en tout cas j'achèterais volontiers un city guide de Toulon (ou Bruxelles) si tu en publiais un :)

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  3. @Cloé: Oui, oui, bien sûr, on se tutoie, c'est plus simple. Je suis ravie si j'ai pu t'aider indirectement (bien que je ne me souvienne pas de cette histoire de blouson en cuir).

    @Méghane: Quand je vois les emmerdes que c'est d'être proprio, si c'est pas pour occuper l'appart moi-même mais pour me taper le souci de le louer et de l'entretenir sans en profiter, je préfère m'en débarrasser!

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  4. Traductrice audiovisuelle moitié salariée moitié freelance, je ne comprends que trop bien ton angoisse puisque les difficultés que tu connais touchent TOUS les traducteurs actuellement... J'ai la chance d'avoir un mi-temps de salariée, mais mon 50% free-lance est très impacté lui aussi et je vois bien la galère dans laquelle se trouve mes collègues 100% indépendants.
    Tu dis aimer transmettre ton savoir mais détester le contact. Du coup, je me demandais : as-tu déjà pensé aux MOOC ? Peut-être en existent-ils des versions "privées" et payantes.

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  5. "la conjoncture a fini par me rattraper comme les autres alors que je ne m'étais préparé aucune porte de sortie.": En fait, j'ai l'impression que les temps changent. J'ai toujours fait de l'intérim et ça me plaisait bien. Je n'ai jamais trop cherché de CDI. Maintenant les missions se font de plus en plus rares; à cause de mon âge et de la conjoncture. Je n'étais pas pour le revenu universel. Je me disais que ceux qui veulent des revenus doivent aller travailler. Je commence à tout remettre en question car je me dis que c'est de moins en moins évident de trouver du travail. Une reconversion ? D'accord mais il faut aussi que la reconversion nous permette de payer nos factures.Je voudrais devenir artiste; peindre des tableaux. On sait bien que la majorité des artistes sont pauvres et que le temps d'apprentissage est long. Je voudrais être couturière et avoir ma boutique de mode. Je n'ai pas les moyens de Zara, H&M et Camaïeu. Je pense de plus en plus que rien n'est facile et que malheureusement il faut chercher à sauver sa peau en prenant le poste qui nous acceptera en CDI :-S Oui je sais. Je ne raconte rien de réjouissant. ;-)
    Bon dimanche !

    Lylou.

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