"C'est assez audacieux de dire un truc pareil en 2012", s'étonnait hier une de mes correspondantes Facebook à qui je venais de faire cet aveu.
Le fait est que j'ai l'impression de faire partie d'une toute petite minorité sur ce coup-là.
La musique, comme tout le monde, j'en ai écouté beaucoup à l'adolescence - essentiellement du rock, qu'il soit hard ou progressif. Je me suis enfermée dans ma chambre avec un casque sur les oreilles en m'absorbant dans les guitares saturées de Marillion et en me disant que si, tiens, finalement, quelqu'un me comprenait. A l'époque, oui, l'histoire de la fille qui se déshabille nerveusement dans les rayons dansants du phare de Fidra faisait vibrer ma petite âme en mal d'expression.
Et puis j'ai fait de la danse pendant longtemps. Alors forcément, la musique classique ou moderne faisait partie de ma vie. Je réécoutais les mêmes morceaux des dizaines, des centaines de fois pour arriver à bien placer mes gestes, sortir des coulisses sur le 4ème temps et non sur le 5ème, terminer une pirouette sans mordre sur le mouvement d'après. L'Adagio d'Albinoni à tous les sauces, les doux rêves d'Eurythmics jusqu'à ce qu'ils peuplent effectivement mes nuits. Toute de noir vêtue, je me suis agitée en boîte tandis que la voix grave de Ian Curtis scandait que l'amour nous déchirerait encore, ou que le chanteur de Suicidal Tendencies se lamentait parce que personne ne l'entendait (si, moi!).
Je ne sais pas trop ce qui a fait que j'ai cessé d'écouter de la musique au milieu des années 90. L'époque des caves d'Aix-en-Provence était révolue et je venais de commencer un boulot pour lequel j'avais besoin de silence et de concentration, moi qui ai toujours été incapable de faire deux choses à la fois. Et puis les nouveaux courants musicaux ne me séduisaient pas du tout.
Aujourd'hui, le morceau le plus écouté sur mon iTunes (le seul support que j'utilise) l'a été seulement 86 fois en, quoi... dix ans ou presque. Je ne mets de musique que le dimanche, pour me donner un peu d'entrain pendant que je fais le ménage, et j'écoute toujours les mêmes trucs. 95% d'entre eux datent d'avant 1994. Le reste? Du Muse, un peu de variété française, deux-trois OMNI genre Cansei de Ser Sexy, Sigur Ros ou les Fatals Picards. De temps en temps, je clique sur la vidéo d'un truc récent posté par un contact Facebook: hier, "No death" de Miral Wagner que la personne avait qualifiée de "Leonard Cohen noire". C'te blague. Je coupe généralement au bout de 30 secondes en poussant un grognement de douleur.
Même quand je fais des choses répétitives comme crocheter, le bruit que je préfère reste celui de mon monologue intérieur. Taxez-moi d'égocentrisme suraigü, mais c'est dans ces moments-là que je développe mes idées de posts les plus fouillées, que j'enfile comme des perles les arguments à opposer au prochain fâcheux qui osera me contredire, que je laisse doucement mûrir mes décisions importantes - en écoutant la petite voix dans ma tête plutôt qu'un quelconque CD.
Alors voilà, je n'ai pas peur de le dire: j'aime plus la musique.
Illustration empruntée ici.
Ca mérite amplement réponse un poil plus longue de ma part, mais laisse-moi le temps d'être réveillée, ne serait-ce qu'un peu.
RépondreSupprimerMais en attendant, essaie une fois de crocheter en écoutant du Steve Reich, sérieusement, c'est magique! :)
J'ai des oreilles hyper sensibles, le bruit, le brouhaha me rendent nerveuse, donc peut de musique (sauf pour le sport, ou quand mon cher et tendre gratouille sa guitare en chantant en boucle) et surtout avec un volume très très bas
RépondreSupprimerJ'ai passé également mon adolescence en musique. J'ai gardé je ne sais combien de centaines de billets de concerts, de chanteurs plus ou moins illustres comme de groupes en marge que personne ne connaissait mais que je trouvais géniaux.
RépondreSupprimerJ'ai fait un peu de radio locale, et j'adorais ça.
Mais comme toi, il y a eu une cassure. Elle n'est pas due à mon métier, ni à un besoin absolu de calme ou de silence... Elle s'est produite également dans les années '90. Plus rien de rare, plus rien de neuf, plus rien de transcendant ne me transcendait... et depuis, si j'allume encore la radio, c'est Nostalgie, à la salle de bain, pendant ma douche et cela se limite à ça.
Pourtant, "je ne pouvais pas vivre sans musique"... comme quoi. :)
Il n'y a qu'en période de relecture que j'ai besoin d'un silence absolu, sinon je travaille toujours en musique. Après, j'en écoute beaucoup moins qu'à une époque. Avant d'être en couple, j'écoutais toujours de la musique pendant une heure ou deux avant de m'endormir, c'était là que me venaient mes idées pour écrire. C'est aussi la musique qui m'a aidé à m'accrocher pendant les heures les plus sombres de mon adolescence. Bref, j'ai le sentiment de lui devoir beaucoup.
RépondreSupprimerAprès, je ne comprends pas en quoi c'est audacieux de faire cet aveu en 2012. Ne pas aimer la musique est ton droit le plus strict, et puis je ne vois pas bien le rapport avec notre époque, mais bon...
Je n'en écoute pratiquement qu'en marchant dans la rue, pour me couper du bruit ambiant. Très rarement chez moi, ou alors pour faire le ménage.
RépondreSupprimerJe n'ai jamais aimé ni eu envie de danser. J'ai vécu de sublimes concerts, mais j'aimais plus l'ambiance globale que le concert en lui-même la plupart du temps, ça ne me manque pas.
D'être au courant des nouveautés ne m'intéresse pas et en général quand le même groupe est cité plusieurs fois sur twitter, je le prends en grippe et j'ai pas envie de savoir à quoi ça ressemble, ce formatage me fait peur (pourtant je suis à fond dans le film ou la série du moment, va comprendre).
Mais dans quelques semaines, je vais emménager avec quelqu'un dont un des principal loisirs est d'aller voir des concerts, qui en parle très bien (même s'il me perd au bout de une minute environ) et qui a souvent besoin d'être entouré de musique.
Je me demande si je vais me réhabituer et avoir envie d'en écouter plus souvent par moi-même, si je vais réussir à faire abstraction ou si ça va me gonfler et qu'on va devoir négocier sur ce point-là.
Je me sens moins seule. JE me dis que ce n'est pas que je n'aime pas la musique... Mais je n'y pense pas et je préfère le silence la plupart du temps. Et puis la musique uniquement comme bruit de fond, c'est dommage. Et puis de toute façon, je préfère écouter les gens :o)
RépondreSupprimerPour avoir RT @KMS__ qui qualifiait effectivement MirEl Wagner de "L. Cohen noire" sur twitter, j'assume :)
RépondreSupprimer(le monsieur m'ayant fait découvrir un maximum de choses sur son blog, du classique pointu aux enregistrements pirates de concerts de Dylan, en passant par du jazz alternatif).
De manière générale, la musique partagée sur les réseaux sociaux me semble plus une invitation à la découverte pour varier ses horizons, qu'une recommandation d'absolue adhésion. "Tiens écoute ça, ça m'a surpris".
Plus je vieillis, plus je me rends compte que la plupart des gens mettent la radio (ou la TV d'ailleurs) juste pour avoir un bruit de fond, et ne pas écouter la solitude qui est en eux.
RépondreSupprimerPersonnellement, j'aime écouter de la musique, j'adore chanter à tue-tête et tout, mais je peux facilement passer plusieurs jours ou semaines sans allumer la radio.
Comme toi, le silence ne me gêne pas, et j'en profite pour réfléchir à plein de petites choses. Cela dit, j'aurais de la musique en fond sonore, ça ne m'empêcherait pas de rester dans ma bulle et de ne même pas entendre la radio !
C'est dommage...
RépondreSupprimerJe ne pourrais pas vivre sans.
Hier encore, écouter le morceau favori du moment m'a permis d'arrêter les idées qui me pourrissaient mon humeur.
Ca me parle ce que tu dis...
RépondreSupprimerMême si j'aime la musique et que j'adore en écouter, parfois même, j'en ressens le "besoin", j'aime aussi énormément et de plus en plus le silence.
...le silence de la petite voix dans ma tête comme tu le dis bien.
Je voulais écrire un truc là-dessus. Pour des raisons différentes, je vis (quasi) sans musique également. C'est comme une infirmité "en 2012". Mais je le vis bien :-)
RépondreSupprimerJ'écoute beaucoup de musique, mais principalement dans mes déplacements. À la maison (qui est aussi l'endroit où je travaille), c'est silence, silence que j'apprécie énormément. D'ailleurs, j'ai toujours pensé que c'est ce qui doit être le plus difficile d'avoir des enfants, les cris et les pleurs...
RépondreSupprimerFaut quand même avouer que ça devient redondant. La musique actuelle m'ennuie, je déteste la radio. les artistes sont plus intéressés par le marketing que par la musique même... Enfin bref tout ça pour dire que j'aime plus la musique non plus.
RépondreSupprimerEt bien ! Tu m'épates ! perso ne ne peux vivre sans musique, j'aime à peu près tout, du classique au rap en passant par la variétés, le métal, des chanteurs classiques algérois etc... Je ne peux vivre sans musique !
RépondreSupprimerJ'aime bien l'ambiance des concerts! J'ai mes artistes préférés que j'écoute pendant mon petit trajet du matin mais jamais je ne mets de musique comme bruit de fond.
RépondreSupprimerANNESO
@Au fil d'Isa : je plaide coupable d'avoir prononcé cette phrase. Mais entendons-nous bien, ça n'était pas une critique. Ca me faisait penser à certains de mes amis qui n'aiment pas le chocolat, là où, généralement, il y a une sorte de "consensus", tu vois? Un étonnement, donc, pas une critique.
RépondreSupprimerTout comme funambuline, je vis avec un geek musical, et je tire de cette vie commune une richesse incomparable en matière de découvertes, tous genres confondus. Maintenant, il faut accepter d'avoir quelqu'un qui veut écouter de la musique expérimentale en voiture, de l'afrobeat un dimanche aprèm, et chacun a ses limites, moi la première et quand je suis seule, je ne mets pas d'office de disques sur la platine.
Mais tout comme Miss Sunalee ou Océane ou d'autres, je ne peux vraiment pas m'imaginer vivre sans musique, au point que ça fait partie de mes "activités secondaires" désormais: chroniquer des albums, défendre des artistes via notre label, compulsivement lire la presse musicale, arpenter les rayons de la médiathèque ou les magasins de vinyls.
Oh c’est curieux...
RépondreSupprimerJe n’ai pas une culture musicale aussi étendue que certaines de mes connaissances ( je me contente de piller la leur, en fait…Oh, salut Anne-Lise et Sunalee, vous étiez la ?), mais je sais que je ne pourrais pas me passer de musique.
D’une façon générale, je n’aime pas les bruits de fond et le brouhaha, j’en endure suffisamment toute la journée, donc je n’écoute pas vraiment de musique en marchant, ou dans les transports en commun. Ou pas systematiquement. J'aime le silence, aussi.
Non, je m’installe et je savoure quand j’ai envie d’en écouter. Je vais voir ce que les gens proposent autour de moi, j’ecoute, je fouine, je note, je m'en garde pour plus tard, puis je fais partager aux autres aussi.
Et curieusement, certains types de musique m’aident justement à me concentrer. ( ou quand je veux débrancher mon cerveau, j’écoute « Finally we are no one » de Mùm en boucle. Redoutablement efficace)
Marillion !! :))) haha, ça me rappelle des souvenirs...
RépondreSupprimertrès bonne idée d'article, je ferais sûrement une réponse sur le thème: "je déteste les concerts" (alors que je suis passionnée de musique, justement d'ailleurs parce que je suis passionnée de musique)
et merci pour ton blog!